Erwin Trum
PERIODE BLEUE
1987 - 1990

Le bleu quand on fait de la peinture à l’œuf c’est la couleur la plus difficile à travailler. Il y a des bleus très forts et très couvrants genre bleu de Prusse, c’est un bleu à la base d’un acide qui est très enveloppant. Et puis les autres bleus, par exemple outremer, ce sont de très bons bleus mais ils sont très légers au point de vue de la qualité chimique et aussi physique si on peut dire. Evidement il y a des autres bleus qui sont plus ou moins compacts comme celui-ci, mais ils ont l’inconvénient d’être trop opaques, c’est-à-dire on travaille mais au détriment de la transparence.




Préparer le blanc d’une toile, d’un support, c’est autant de caresses sur un corps de femme. La blancheur ne supporte pas de maquillage. Les rides traversent, elles ne sont point un ancrage, heureusement.


J’essaie d’être simple dans mon expression. Je ne vais pas faire une peinture qui nécessite un discours d’introduction explicatif parce que pour moi ce n’est plus de la peinture, sinon je fais un mode d’emploi pour le spectateur éventuel qu’il n’a plus qu’à déplier.








Je fais des peintures assez petites, des fois d’un format moyen. Je ne sais point si cette peinture tiendra le coup au moment où tout le monde ne jure que par les grands formats. Si ma peinture tient le coup ce ne sera pas à cause du format. Si elle tient, grand ou petit, le format n’y est pour rien.





Je crois à l’homme global et la peinture n’est qu’une activité parmi d’autres. C’est pour ça que je n’ai jamais considéré la peinture autrement qu’en dehors d’un autre métier, il faut un métier de base, garder le lien avec la vie, le lien avec la réalité.




La physique et la chimie des couleurs, des médiums, sont en peinture ce que la grammaire, la syntaxe et le lexique sont à la littérature.



La peinture c’est d’abord fait pour les yeux, pas pour la cervelle.




Je n’use jamais du blanc, je reste sur le blanc du fond. Des fois c’est le fond qui demande plus de travail et de temps que le tableau lui-même. C’est espacé dans le temps, il faut poncer, il faut une couche d’apprêt, il faut laisser sécher, re-poncer et cætera. Par exemple avec toute la période de séchage, l’impression du fond, ce tableau en préparation du panneau m’a pris à peu près une dizaine de jours. Evidemment je travaille aussi entre temps, mais le tableau lui-même a été fait en deux jours.







Ne perdons pas de temps dans des querelles inutiles dans le pour et le contre d’un "Art de l’état", un "Art institutionnel", un "Art dominant" etc… Quelques soient les régimes et l’époque, il y aura toujours un académisme, un art politiquement, officiellement et socialement consentant quelconque. Après tout, chaque peintre rêve de son pape mécène, de son prince de renaissance. Après tout déjà l’ancien testament commence avec une histoire de cireur de pompes. Dans la querelle des élites et des universitaires il y aura toujours une force d’interposition, des casques bleus, des galeries marchandes… Et puis il restera toujours un obus en réserve dans la grosse Bertha de Kant.






Partout où j’étais dans ma vie, sauf en Indochine, je me débrouillais toujours pour avoir des œuvres de Nietzsche sur moi. Et paradoxalement parce ce que Nietzsche a aussi écrit «L’antéchrist», j’avais toujours une bible sur moi, mais une bible Luthérienne parce que je l’aimais pour son langage poétique, sa force poétique. Pas tant pour des questions religieuses mais pour sa qualité en tant qu’œuvre littéraire.












Il y a du miniaturiste et de l’enlumineur chez Erwin TRUM. Mais comme Altdorfer a pu peindre l’idée de la forêt, TRUM peint l’idée de féerie, l’idée du songe, l’essence des légendes.
Véronique FABRE -1991







La réalité objective en peinture n’existe pas. Ce qui existe par contre, c’est le comportement du peintre envers la réalité, c’est sa réalité à lui ou sa façon qu’il la voit.












